Contempler parallèlement son style d’écriture avec le style de jazz de Miles Davis, c’est une tâche que me proposa Édouard Glissant lui-même, au cours d’un entretien qu’il m’accorda en juillet 2005. J’étais venu le rencontrer dans le Pays Basque où il se produisait avec Bernard Lubat, alors que je commençais un travail de doctorat sur les relations de son œuvre avec la musique.
Se livrer à une écoute musicale de l’écriture d’Édouard Glissant et à une lecture poétique de la musique de Miles Davis, implique que l’on consente à la démesure de la métaphore, mais aussi à la démesure de ces créateurs titanesques, dont l’œuvre est si difficile à cerner et à circonscrire dans des genres ou des procédés. Une telle écoute exige paradoxalement une attention constante à la précision de l’écriture, à la rigueur des choix formels qui dictèrent l’évolution des musiques.
À travers onze chapitres traitant notamment de l’improvisation et de l’écriture, du lien entre le sens et le son, du lyrisme et du rythme, ce livre tente de s’approcher d’une « grammaire de la création » commune aux deux artistes, sans ignorer que de tels univers sont par essence à l’abri de toute réduction mécaniste, protégés par cette « mystérieuse bleuité » dont parle Édouard Glissant et que Sylvie Séma nous laisse entrevoir dans son œuvre picturale.
Préface de Hugues Azérad
Jean-Luc Tamby est luthiste et docteur en musicologie, spécialiste des prolongements musicaux de l’œuvre d’Édouard Glissant. Il est professeur au Conservatoire à Rayonnement Régional de Rennes et intervient à l’Université de Rouen ainsi qu’au Pôle d’Enseignement Supérieur Bretagne Pays de la Loire.